Conférence de Lucien Willemin
Le 12.09.24Que choisir entre une pomme bio de l’étranger et une pomme non-bio d’ici ?
Conférence sur l’agriculture biologique par Lucien Willemin
Ce jeudi 12 septembre 2024, nous avons eu le plaisir d’accueillir Monsieur Lucien Willemin, qui est venu cette fois-ci nous donner des pistes pour adopter une alimentation plus responsable et nous présenter son livre Tu parles, Charles ! Manger local, c’est loin d’être idéal.
Nous avions déjà découvert son engagement personnel lors de sa première conférence en 2017, au cours de laquelle il nous avait enseigné à quel point la fabrication de tout nouvel objet requiert une quantité considérable de ressources : l’énergie grise.
Ce soir, Lucien nous a une fois de plus surpris en nous expliquant pourquoi manger une pomme locale peut parfois être bien plus polluant que de consommer une pomme bio importée de l’étranger.
Tout d’abord, il a établi une distinction entre l’agriculture sans chimie de synthèse et l’agriculture qui en utilise.
L’agriculture sans chimie de synthèse est véritablement biologique ou biodynamique, et ses produits portent respectivement les labels « Bio Suisse » ou « Demeter ». Elle utilise des engrais naturels ainsi que des substances biologiques.
En revanche, l’agriculture ayant recours à la chimie de synthèse – qu’elle soit conventionnelle, PER (Prestations Écologiques Requises) ou IP-SUISSE – utilise des engrais et des pesticides de synthèse. Ces produits sont commercialisés sous des labels tels que « Suisse Garantie », « TerraSuisse », « Ma Région », « IGP », « De la Région », etc.
Ces labels visent à rassurer, voire à tromper, le consommateur en laissant entendre que cette agriculture respecte l’environnement et le bien-être animal. Or, en plus de contaminer nos sols, notre eau et notre alimentation, cette agriculture est particulièrement énergivore. Sachant qu’il faut 2 litres de pétrole pour produire 1 kg d’azote et qu’un hectare de blé nécessite 100 kg d’azote, cela représente une consommation de 200 litres de pétrole par hectare de blé.
Lucien nous a donné plusieurs exemples de pollution de l’eau, notamment ceux rapportés par l’Agence française de l’eau, qui a relevé des concentrations de glyphosate dans les trois quarts des cours d’eau, atteignant jusqu’à 200 fois la norme autorisée pour l’eau potable.Un rapport de l’Office fédéral de l’environnement met en évidence la présence d’environ 128 substances chimiques utilisées dans l’agriculture au sein de nos cours d’eau, dont 61 herbicides, 45 fongicides et 22 insecticides.
Un test, mené en 2019 par l’émission ABE (À Bon Entendeur) a révélé que, sur 26 pommes issues de l’agriculture conventionnelle, 22 contenaient des résidus de pesticides de synthèse. Sans surprise, en 2017, cette même émission avait déjà détecté des traces de glyphosate dans l’urine de 40 % des Romands testés.
En 2021, des médecins neuchâtelois ont mis en évidence la présence de traces de néonicotinoïdes dans le liquide céphalo-rachidien d’enfants atteints de leucémie et de lymphomes.
Pourtant, en 2018, le Conseil national a décidé de maintenir l’autorisation du glyphosate, arguant que les connaissances scientifiques actuelles ne justifiaient pas son interdiction. Ainsi, on nous recommande de ne pas manger trop gras ni trop salé, mais visiblement, aucun problème avec le glyphosate. Selon l’Office fédéral de l’agriculture, il se vend en moyenne 2 000 tonnes de pesticides par an en Suisse, soit 28 % de plus qu’en l’an 2000, dont 85 % sont utilisés dans l’agriculture. On ne va pas dans la bonne direction.
Nous comprenons maintenant pourquoi une pomme cultivée sans chimie de synthèse est plus saine et plus écologique, même si elle a parcouru plusieurs centaines de kilomètres en camion.
Notre président, Lukas, a remercié chaleureusement Monsieur Willemin pour cette conférence très instructive et d’être venu tout spécialement du Jura neuchâtelois. Avant son départ, nous avons pu profiter de faire plus ample connaissance avec ce personnage fort sympathique et profondément engagé pour un monde meilleur, dans un restaurant à proximité.
Texte : Christophe Lyner